Dresser un nouveau document d’arpentage est obligatoire lorsque l’expropriation modifie les limites des terrains concernés
En cas d’expropriation partielle d’une propriété, il est obligatoire d’informer pleinement les expropriés et de leur permettre de pouvoir identifier exactement la portion dont ils vont être expropriés et la portion qu’ils vont conserver. Pourtant les expropriants ne font pas toujours actualiser le cadastre pour identifier les nouvelles limites provoquées par l’expropriation, et ils poursuivent souvent la procédure de cessibilité à partir de plans incomplets avec seulement la numérotation ancienne des parcelles au cadastre (numéro d’identification au cadastre suivi de la mention « p »).
C’est ainsi qu’il arrive régulièrement que l’arrêté de cessibilité se fonde sur une matrice cadastrale périmée.
C’est dans ce type de circonstances que des propriétaires expropriés ont contesté, devant la juridiction administrative, l’arrêté de cessibilité d’une opération d’expropriation, en invoquant l’imprécision de la définition du périmètre de l’expropriation sur leur propriété.
Si le tribunal administratif puis la cour administrative d’appel ont rejeté leur requête, le Conseil d’Etat y a finalement fait droit, dans un arrêt du 9 juillet 2018 (Conseil d’Etat, 9 juillet 2018, req n°406696).
Se fondant sur le code de l'expropriation (précisément son ancien article R. 11‑28 devenu, depuis, les articles R 132‑1 et suivants du code de l’expropriation) et sur le décret du 4 janvier 1955 portant réforme de la publicité foncière (précisément son article 7), le Conseil d’Etat estime qu’un arrêté de cessibilité est illégal s’il se fonde sur une identification cadastrale imprécise et périmée :
« Il résulte des dispositions [précitées] que lorsqu'un arrêté de cessibilité déclare cessibles des parties de parcelles, ce qui implique de modifier les limites des terrains concernés, un document d'arpentage doit être préalablement réalisé afin que l'arrêté de cessibilité désigne les parcelles concernées conformément à leur numérotation issue de ce document ».
► Si l'expropriation modifie les limites des terrains, l'expropriant doit faire modifier le cadastre avant l'arrêté de cessibilité
Le Conseil d’Etat souligne bien que cette obligation de faire modifier, sur le cadastre, les limites des terrains concernés par l’expropriation est une garantie fondamentale pour les propriétaires expropriés et que le défaut d’accomplissement préalable de cette obligation rend l’arrêté de cessibilité illégal : avocat expropriation
« Le défaut d'accomplissement de cette obligation, qui constitue alors une garantie pour les propriétaires concernés par la procédure d'expropriation, entache d'irrégularité l'arrêté de cessibilité. »
Analysant au fond l’arrêté préfectoral de cessibilité contesté par les requérants, le Conseil d’Etat constate qu’il « ne prévoit la cession que d'une partie des parcelles AL 27 et 28 … et que la collectivité expropriante n'a pas fait réaliser un document d'arpentage ».
Il en déduit que « l'absence de ce document, qui constituait une garantie pour M. B...et autres, entache d'irrégularité l'arrêté attaqué, en tant qu'il déclare cessibles, au profit de la commune de V…., une partie des parcelles AL 27 et 28 leur appartenant » et il prononce, par conséquent, l’annulation de cet arrêté de cessibilité.
Le Conseil d’Etat règle donc définitivement ce contentieux administratif, mais il restera encore aux expropriés à en faire constater les conséquences par le juge de l’expropriation (restitution ou indemnisation supplémentaire par le biais de la procédure de constatation du défaut de base légale de l’ordonnance de transfert de propriété).